Bruno Sibilli est rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris.
Bruno SIBILLI
Rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris
Rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris
Bruno Sibilli est rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris.
Annexe 4 : CAA Paris, 9e ch., 6 oct. 2023, n° 21PA00260, Sté Axa SA, concl. B. Sibilli, C
Annexe 5 : CAA Paris, 9e ch., 10 nov. 2023, n° 21PA01640, Min. c/ Sté Legrand SA , concl. B. Sibilli , C
Annexe 6 : CAA Paris, 9e ch., 15 déc. 2023, n° 21PA01850, Société Générale et n° 21PA03001, Min. c/ Sté Compagnie Plastic Omnium SE, concl. B. Sibilii, C
Annexe 7 : CAA Paris, 9e ch., 20 oct. 2023, n° 21PA01399, f Plc Paris Branch, concl. B. Sibilli, C
Annexe 4 : CAA Paris, 9e ch., 17 nov. 2023, n° 21PA06186 et 22PA01277, Axa Investment Managers Deutschland Gmbh, concl. B. Sibilli, C
Annexe 3 : CAA Paris, 9e ch., 28 sept. 2023, n° 22PA00640, De Haaij, concl. B. Sibilli, C
#Mots-clés: Prix de transfert, Contrôle, Méthode, partage de la valeur ajoutée, Preuve, coût majoré, Ajustements du taux de marge, Retenue à la source
#Article du CGI/LPF: 57, L. 13 AA
#Convention fiscale:
#Pays:
L’administration fiscale a remis en cause les prix de transfert pratiqués par une société française avec les autres sociétés de son groupe, sur le fondement de l’article 57 du CGI, estimant en l’espèce qu’il y a eu sous-évaluation des prix pratiqués par la société productrice.
La CAA juge, conformément aux conclusions du rapporteur public, que l’administration n’établit pas l’existence d’un avantage accordé par la société française aux autres entités du groupe. Elle considère que :
- si l’existence d’une insuffisance de marge nette revenant au producteur, par rapport à l’objectif de marge nette assigné en application de la méthode de partage de profit (« profit split ») définie au niveau du groupe, est susceptible de faire présumer l’existence d’un avantage consenti par le producteur aux distributeurs au sens de l’article 57 du CGI, en l’espèce, la critique du calcul des marges nettes de la société française étant infondée, l’administration n’établit pas l’existence d’un tel avantage ;
- en outre, il ne résulte pas de l'instruction que des circonstances exceptionnelles soient survenues au cours de la période en litige, impliquant un ajustement de la marge pratiquée par la société française. Par suite, l’administration ne rapporte pas davantage la preuve que les ajustements auraient dû être effectués pour justifier du bien-fondé de la méthode employée et des prix de transfert qui en procèdent.
#Mots-clés: Prix de transfert, Transfert de bénéfices à l’étranger, Convention de garantie, Niveau de rémunération, rémunération de pleine concurrence, dérivé de crédit, banque
#Article du CGI/LPF: 57
#Convention fiscale:
#Pays:
Dans le contexte de la crise bancaire déclenchée en 2008, une banque luxembourgeoise a conclu avec sa société mère française, une convention de garantie par laquelle cette dernière s’est engagée à couvrir, sous réserve d’une franchise annuelle de 50 millions d’euros, la valeur d’une fraction du portefeuille de titres de dettes souveraines de sa filiale en cas de réalisation de certains évènements de crédit, moyennant une rémunération égale à 0,10 % puis 0,20 % de l’encours et fondée sur les probabilités de défaut historiques.
À l’occasion d’une vérification de la comptabilité de la société mère, l’administration fiscale a estimé que le niveau de rémunération de cette garantie était inférieur à une rémunération de pleine concurrence évaluée à 0,77 % de l’encours et caractérisait un transfert de bénéfices à l’étranger au sens de l’article 57 du CGI.
La CAA de Paris, conformément aux conclusions du rapporteur public, annule le jugement du TA (TA Montreuil, 10 juin 2021, n° 1901942, Sté CIC, concl. C. Noël : FI 3-2021, n° 4, § 30) et valide le taux de rémunération de la garantie.
Selon la CAA, la convention de garantie en cause ne peut s’analyser comme une simple opération de crédit au sens de l’article L. 313-1 du code monétaire et financier, mais doit être regardée comme un dérivé de crédit ayant pour sous-jacent une part de l’actif de la filiale luxembourgeoise et s’apparentant ainsi à un contrat d’échange sur le risque de défaut (« credit default swap »).
Elle précise que l’administration ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que les prestations litigieuses auraient été facturées à un niveau de prix inférieur à celui qui aurait été pratiqué par des entreprises similaires exploitées normalement, ni même, à supposer même qu’elle ait entendu se placer sur ce terrain, de l’existence d’un écart injustifié, révélateur d’une libéralité, entre les sommes facturées et la valeur vénale de la prestation fournie.
#Mots-clés: Groupe de sociétés, Intégration fiscale, Imputation, résultat d’ensemble, pertes définitives, filiale à l’étranger, jurisprudence Marks & Spencer, Liberté d’établissement, Droit de l’Union européenne
#Article du CGI/LPF: 209, 223 A
La CAA de Paris précise la notion de pertes définitives au sens de la jurisprudence Marks & Spencer du 13 décembre 2005 de la CJUE, dans deux affaires jugées en première instance par le TA de Montreuil (TA Montreuil, 11 févr. 2021, n° 1808706, Sté Compagnie Plastic Omnium, et n° 1804038, Société Générale, concl. C. Noël : FI 2-2021, n° 4, § 13, comm. F. Teper).
Dans les deux affaires, la CAA de Paris juge que les pertes subies par les sous-filiales établies à l’étranger revêtent un caractère définitif, au sens du point 55 de l’arrêt Marks & Spencer, et que le refus opposé par l’administration fiscale à leur imputation sur les résultats du groupe imposables en France est contraire au 3 des articles 49 et 54 du TFUE.
Les pertes subies à l’étranger étant définitives, la CAA considère qu’elles peuvent être admises en déduction du résultat d’ensemble du groupe fiscal dont la société mère est française. La cour relève également qu’il ne peut être fait grief aux sociétés françaises de ne pas avoir rapporté la preuve de l’impossibilité « absolue » pour leurs sous-filiales de poursuivre leurs activités ni de valoriser leurs pertes en les cédant à des tiers.
Annexe 1 : CAA Paris, 9e ch., 28 juin 2023, n° 21PA03000, SA Établissement J. Soufflet et n° 21PA04456, Min. c/SA Établissement J. Soufflet, concl. B. Sibilli, C
Annexe 3 :CAA Paris, 9e ch., 2 juin 2023, n° 21PA02599, Shurgard France SASU et n° 21PA03844, Min. c/ Shurgard France SASU, concl . B. Sibilli , C
Annexe 6 :CAA Paris, 9e ch., 12 mai 2023, n° 20PA04068 et 21PA05182, SAS Bayer, concl . B. Sibilli , C
Annexe 7 : CAA Paris, 9e ch., 31 mars 2023, n° 21PA01514, Min. c/ SAS Howmet, concl. B. Sibilli, C
Annexe 2 :CAA Paris, 9e ch., 10 nov. 2022, n° 21PA01182, Wasserman, concl. B. Sibilli, C+
La CAA de Paris était saisie par une société gestionnaire de fonds d’investissement de demandes de remboursement de retenues à la source prélevées sur des dividendes de source française, fondées sur l'incompatibilité avec le droit de l’UE du dispositif français de retenue à la source sur les dividendes sortants (cf. CJUE, 10 mai 2012, C-338/11 à 347/11, Santander Asset Management SGIIC SA et a.).
L’administration avait considéré que les réclamations déposées étaient irrecevables au motif qu'elles n’étaient pas chiffrées. Le litige avait donc été porté devant le TA de Montreuil qui, par un jugement du 14 octobre 2021, avait rejeté, pour ce même motif, les demandes de remboursement.
La CAA estime en revanche que la demande était recevable au regard des dispositions du LPF. Elle précise en effet que si, lors du dépôt de ses réclamations, la contribuable, dans l'attente de données exactes provenant de sa banque de dépôt, a indiqué n'être « malheureusement pas en possession du montant exact de remboursement » et n'a donc pas précisément chiffré ses prétentions, cette carence, en l'espèce, n'est ainsi pas constitutive d'un vice de forme affectant la recevabilité de ses réclamations, et a, en tout état de cause, été régularisée par sa demande adressée au tribunal administratif, conformément à l'article R. 200-2 du LPF. Elle ajoute que sa demande comportait, en pièce jointe, des justificatifs des retenues à la source dont le remboursement était demandé. La CAA considère donc qu’un chiffrage n’est pas nécessaire à partir du moment où l’imposition en litige est identifiable.
La CAA a ensuite accordé la restitution des retenues à la source en litige appliquant la jurisprudence du Conseil d’État sur les « sondervermögen » (CE, 9 juin 2022, n° 447932, Sté Patrizia Frankfurt Kapital Verwaltungsgesellschaft mbH, concl. E. Bokdam-Tognetti : FI 4-2022, n° 2, § 1, comm. C. Guibé) ; les fonds en cause étant comparables avec un OPCVM français.
Conformément aux conclusions du rapporteur public, la CAA a donc annulé le jugement du TA et accordé le remboursement des retenues à la source.
La présente affaire pose la question de l’effet d’une procédure de rehaussement au titre de l’impôt sur les sociétés d’une filiale d’un groupe intégré quant à la possibilité pour la société mère de réclamer des crédits d’impôt.
La CAA rappelle que la notification régulière à une société membre d’un groupe fiscalement intégré de rehaussements apportés à son bénéfice imposable au titre d’un exercice déterminé ne permet à la société mère de se prévaloir du délai de réclamation prévu à l’article R. 196-3 du LPF que pour les impositions correspondant aux résultats individuels de la filiale redressée.
Sans qu’y fasse obstacle l’article 223 O du CGI, la notification de ces redressements à la société tête de groupe ne l’autorise pas à solliciter, dans ce même délai de réclamation, la correction du montant des crédits d’impôt attachés aux produits imposables reçus par d’autres filiales que la filiale redressée. En revanche, l’article R. 196-1, b du LPF autorise la société mère, dans le délai qu’il prévoit, décompté de la date de perception de la retenue à la source en cause, à demander la correction du montant des crédits d’impôt attachés aux produits imposables perçus par une filiale du groupe, objet d’une retenue à la source imputable sur l’impôt dû par la société en qualité de tête de groupe, en application de l’article 223 O, a du CGI.
En l’espèce, la filiale française d’un groupe fiscalement intégré dont la société mère est une société de droit britannique, a fait l’objet d’une procédure de rehaussement au titre de l’impôt sur les sociétés dû pour les exercices clos en 2010 et 2011, ouverte par une proposition de rectification du 22 avril 2014. La CAA rappelle que cette procédure n’a ouvert, pour la société mère du groupe et redevable de l’impôt sur les sociétés, un délai de réclamation courant jusqu’au 31 décembre 2017 sur le fondement de l’article R. 196-3 du LPF, que pour les impositions correspondant aux résultats individuels de la filiale redressée.
Dès lors, la CAA juge que l’ouverture du délai spécial de réclamation en cause ne permettait pas à la société tête de groupe de demander, le 25 octobre 2017, soit au-delà du délai général de réclamation expirant en l’espèce le 31 décembre 2012, résultant de l’article R. 196-1, b, du LPF, la correction du montant des crédits d’impôt forfaitaires attachés aux redevances de source chinoise perçues par vingt-trois autres de ses filiales et imputés sur la cotisation d’impôt sur les sociétés dont elle s’est acquittée au titre de l’exercice clos en 2010.
Une société française qui avait reçu de ses filiales établies au Chili des dividendes, demandait à être déchargée de la quote-part de frais et charges sur le fondement de l’article 22 de la convention franco-chilienne de 2004, aux termes duquel « Les dividendes payés par une société qui est un résident du Chili à une société qui est un résident de France sont exonérés d’impôt en France dans les mêmes conditions que si la société qui paye les dividendes était un résident en France ou d’un État membre de l’Union européenne […] »
. L’administration ayant rejeté sa demande, elle a porté le litige devant le TA de Montreuil qui, par un jugement du 3 décembre 2020, lui a accordé la restitution demandée (TA Montreuil, 3 déc. 2020, n° 1908285, Sté Legrand, concl. C. Noël : FI 1-2021, n° 4, § 26, comm. N. de Boynes). La CAA a, en revanche, suivi les conclusions du rapporteur public et inversé la solution. Elle juge qu’il résulte des stipulations conventionnelles précitées, éclairées par les travaux préparatoires relatifs à la loi de ratification de cette convention, qu’elles tendent, au moyen d’un principe équivalent à celui du régime mère-fille prévu à l’article 216 du CGI, à éviter la double imposition des dividendes versés par les filiales chiliennes à leur société mère française résultant des impositions à la source sur les bénéfices distribués de source chilienne, perçues conformément au droit interne chilien. Faute de toute stipulation en ce sens, elles n’ont pas pour objet de permettre à la société mère française, en application du régime d’intégration fiscale applicable à certaines sociétés françaises, de défalquer la quote-part pour frais et charges de son bénéfice consolidé.
La présente affaire porte sur la déductibilité de la quote-part de frais et charges des bénéfices d’une société tête de groupe sur le fondement de l’article 223 B du CGI. La question posée est notamment de savoir si l’article 223 B doit, outre la liberté d’établissement, également respecter la libre circulation des capitaux et si dans l’affirmative ce principe est méconnu par ces dispositions.
En l’espèce, la société requérante demandait la reconstitution de ses déficits reportables et la restitution des cotisations d’impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt qu’elle a acquittées au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, correspondant à la quote-part de frais et charges relative aux dividendes reçus de sa filiale suisse. Elle se fondait sur la libre circulation des capitaux, qui concerne également les États tiers, pour obtenir la transposition du raisonnement validé par la jurisprudence Steria reposant sur une entrave à la liberté d’établissement.
La CAA de Paris juge qu’eu égard au pourcentage de détention de la société mère dans sa filiale suisse, égal à 100 % de son capital, et à l’influence déterminante qu’elle lui permet d’exercer sur les décisions et l’activité de cette dernière, la liberté d’établissement est seule mise en œuvre en l’espèce par la société requérante. Or, la filiale est établie dans un État tiers à l’Union européenne et n’est pas intégrée fiscalement au groupe dont la seule redevable est la société requérante. Dès lors, la société requérante ne peut utilement soulever le moyen tiré de l’atteinte au principe de libre circulation des capitaux garanti à l’article 63 du TFUE.
Le requérant, de nationalité néerlandaise, a dans un premier temps exercé des fonctions de « managing director » au sein d’une banque d’affaires située à Londres, entre le 30 octobre 2000 et le 31 mai 2012, dans le cadre d’un contrat de travail de droit britannique. Puis, dans un second temps, a rejoint dès le 1er juin 2012, la société française de cette banque d’affaires au sein de laquelle il a exercé les fonctions de directeur général, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée de droit français. L’administration a remis en cause le bénéfice du régime forfaitaire d’exonération à hauteur de 30 % du revenu des impatriés prévu à l’article 155 B du CGI, dont s’était prévalu l’intéressé au titre des années 2013 et 2014 aux motifs que son arrivée au sein de la société française résultait d’une mutation intragroupe.
La CAA de Paris précise qu’il résulte de l’article 155 B que seules les personnes recrutées directement à l’étranger par une entreprise installée en France, et non les personnes effectuant une mobilité entre entités d’un même groupe, peuvent bénéficier, sur option, de l’exonération d’imposition forfaitaire de 30 % de leur rémunération. Ainsi, eu égard aux conditions générales d’emploi du requérant, notamment à la durée de son engagement, la nature des fonctions occupées de longue date auprès de la banque d’affaires, et alors même que sa lettre d’engagement et son contrat de travail sont établis avec la seule société française et qu’il avait des relations personnelles avec son recruteur français, le requérant, qui doit être regardé comme ayant été transféré au sein d’un même groupe de sociétés, ne peut être regardé comme étant au nombre des salariés autres que ceux appelés par une entreprise établie dans un autre État pour exercer des fonctions dirigeantes en France, au sens donné à ces termes par l’article 155 B.
#Mots-clés: Intérêts, déductibilité, taux, limitation, groupe de sociétés, prêt intragroupe, taux d’intérêt de marché, charges financières, prix de transfert, benchmark, scoring, étude de marché, rating
#Article du CGI/LPF: 39, 212
Métachron###Auteur: Gilles¤ VINCENT DU LAURIER
#Qualités: Avocat associé au sein du cabinet Fidal
#Auteur: Serge¤ LAMBERT
#Qualités: Avocat au sein du cabinet Fidal
#Auteur: Laurent¤ LECLERCQ
#Qualités: Directeur associé chez Fidal
#Auteur: Franck¤ LOCATELLI
#Qualités: Avocat associé au sein du cabinet Fidal
La question de la preuve acceptable pour démontrer qu’un taux d’intérêt versé à une société liée est un taux « de marché » a fait l’objet de nombreuses décisions du juge administratif. Après une période de décisions défavorables aux contribuables (V. § 5), suivie d’une période intermédiaire émaillée de décisions contradictoires (V. § 6), une nouvelle période s’établit désormais où les juges ouvrent, aux contribuables diligents, la possibilité d’apporter la preuve contraire (V. § 19).