#Mots-clés: Apport de titres, Plus-value, Plus-value sur titres, Gain de levée d’option, Sursis d’imposition, Réduction de capital, Valeur nominale des parts, Remboursement d’apports, Répartition
#Article du CGI/LPF: 80 bis, 120, 150-0 B, 150-0 D, 163 bis C
Cette décision pose, dans le prolongement de la jurisprudence Elkaim du 7 mars 2019 (CE, 7 mars 2019, n° 420094, Min. c/ Elkaïm, concl. R. Victor : Lebon T. ; IP 2-2019, n° 6, § 18, comm. O. Janoray et A. Grajales), la question de la fraction taxable des remboursements d’apports qui sont faits par une société à laquelle ont été apportés des titres grevés d’une plus-value en sursis d’imposition ou, comme en l’espèce, d’un gain de levée d’option placé en report.
Selon les faits de l’espèce, entre 2005 et 2007, un contribuable personne physique a apporté ses actions acquises suite à une levée d’option à une société de droit belge dont il détenait la quasi-totalité des parts ; l’opération d’apport ainsi réalisée a été placée sous le sursis d’imposition prévu par l’article 150-0 B du CGI. En 2010, la société belge a procédé, par diminution de la valeur nominale de ses parts, à une réduction de capital non motivée par des pertes. L’administration fiscale, estimant que la somme versée en conséquence au contribuable avait la nature, non d’un remboursement d’apports, mais d’une répartition taxable entre ses mains sur le fondement du 3° de l'article 120 du CGI, a mis à sa charge des suppléments d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales.
Le TA de Paris puis la CAA ont écarté la position de l’administration fiscale. La CAA a en effet jugé que les sommes versées au contribuable devaient être intégralement regardées comme un remboursement d’apport au sens de l'article 120 du CGI aux motifs, d’une part, que le bilan comptable de la société de droit belge ne faisait alors apparaître ni bénéfices, ni réserves autres que la réserve légale et, d’autre part, que le montant des répartitions appréhendées par le contribuable n’excédait pas la valeur à laquelle les titres apportés étaient entrés dans son patrimoine.
Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique s’est pourvu en cassation contre cet arrêt.
Le Conseil d’État, suivant les conclusions du rapporteur public, annule la décision de la cour.
Le Conseil d’État rappelle que lorsque les titres d’une société sont apportés par un contribuable soumis à l'impôt sur le revenu qui reçoit, en échange, des titres de la société bénéficiaire de l’apport et, bénéficie, en application de l'article 150-0 B du CGI, de la prorogation du report d’imposition du gain résultant de l’exercice de l’option d’acquisition des titres apportés ainsi que du régime, prévu à cet article, de sursis automatique d’imposition du résultat de l’opération d’apport, ces titres doivent être réputés entrés dans le patrimoine de l’apporteur aux conditions dans lesquelles étaient entrés les titres dont il a fait apport.
Par suite, le Conseil d’État considère que lorsque la société bénéficiaire de l’apport procède à une réduction de son capital social, non motivée par des pertes, par diminution de la valeur nominale de ses parts, les sommes mises en conséquence à la disposition d’un associé qui a acquis ces parts en rémunération de l’apport de titres d’une autre société ne peuvent constituer des remboursements d’apports non constitutifs de revenus distribués, au sens du 3° de l'article 120 du CGI et sous réserve du respect des conditions auxquelles ces dispositions subordonnent leur application, que dans la limite du prix versé par cet associé pour acquérir les titres apportés.
Le Conseil d’État précise ensuite que lorsque tous les bénéfices ou réserves de la société bénéficiaire de l’apport ont été auparavant répartis, de sorte que les sommes qu’elle verse aux associés en conséquence de la réduction de son capital sont réputées constituer un remboursement partiel des apports qui lui ont été consentis, ces sommes ne sont réparties en franchise d’impôt au profit de l’associé qu’à concurrence du rapport formé, au numérateur, par le prix versé par cet associé pour acquérir les titres apportés et, au dénominateur, par la valeur à laquelle l’apport fait par cet associé a été enregistré dans les comptes de la société qui en a bénéficié.