#Mots-clés: Abus (Dispositifs anti-), Évasion fiscale, Sportif professionnel, résident fiscal français, régime fiscal privilégié, société panaméenne, contrôle sur la société par le résident, composition de l’actif, droit d’exploitation de l’image, méthode d’évaluation, valeur réelle, valeur comptable, revenus de capitaux mobiliers, comptes ouverts à l’étranger, défaut de déclaration de comptes
#Article du CGI/LPF: 123 bis, 1736
#Convention fiscale:
#Pays:
La présente décision porte sur la mise en œuvre de l’article 123 bis du CGI et plus précisément sur la question de la vérification du critère tenant à ce que l’actif de l’entité située dans l’État ou territoire à fiscalité privilégiée est majoritairement composé de « valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants ».
Il ressort des faits de l’espèce qu’à la suite d’un contrôle sur pièces, un résident français exerçant la profession de joueur de football professionnel, et son épouse, se sont vu notifier en 2018 des rehaussements de leur impôt sur le revenu au titre de l’année 2015, procédant de la taxation entre leurs mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en application des dispositions de l’article 123 bis du CGI, de la totalité des sommes perçues au cours de cette année par la société de droit panaméen détenue à 100 % par le sportif, en contrepartie de l’exploitation de son droit de l’image. L’administration fiscale leur a par ailleurs infligé une amende pour défaut de déclaration de comptes ouverts à l’étranger, sur le fondement du 2 du IV de l’article 1736 du même code.
Par un jugement du 23 juin 2022, le TA de Paris a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles les époux ont été assujettis ainsi que des pénalités correspondantes, confirmé en appel par un arrêt du 13 décembre 2024 (CAA Paris, 13 déc. 2024, n° 22PA04160, Min. c/ Di Maria et Cardoso, concl. A. de Phily, C : FI 2-2025, n° 9, § 15, comm. P. Kouraleva-Cazals). Le ministre se pourvoit en cassation contre cet arrêt.
Le Conseil d’État, conformément aux conclusions du rapporteur public, rejette le pourvoi du ministre.
Il précise que par les dispositions de l’article 123 bis du CGI, le législateur a entendu imposer les résidents fiscaux à raison des bénéfices réalisés à l’étranger par certaines entités établies dans des États ou territoires dans lesquels elles sont soumises à un régime fiscal privilégié, sur lesquelles ces résidents exercent un contrôle, même partagé, quelle que soit sa forme juridique, et dont l’actif ou les biens sont constitués, à hauteur de la moitié au moins de la valeur totale, de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants. Pour l’appréciation de cette dernière condition, il convient de retenir la valeur réelle des éléments d'actif de l’entité. L’administration est toutefois fondée, en l’absence d’argumentation du contribuable tendant à démontrer que la valeur réelle de ces éléments d'actif s'écarte de la valeur pour laquelle ils sont inscrits en comptabilité, à retenir cette dernière valeur.
Le Conseil d’État juge en premier lieu que la cour n’a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que le droit d’exploitation de l’image inscrit à l’actif de la société panaméenne ne constituait pas une créance au sens de l’article 123 bis du CGI.
Il ajoute en second lieu, qu’en l’absence de contestation par le ministre de ce que la valeur réelle des autres éléments de l’actif de la société étrangère, composés pour l’essentiel de dépôts, comptes courants et obligations, ne s’écartait pas de leur valeur comptable, la cour a pu, sans erreur de droit se fonder, pour apprécier si l’actif de cette société était principalement constitué de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants au sens de l’article 123 bis du CGI, prendre en compte la valeur réévaluée du seul droit d’exploitation de l’image.
Le Conseil d’État juge que la cour n’a pas commis d’erreur de droit ni inexactement qualifié les faits de l’espèce en déduisant de ces constatations, desquelles il découlait que ce droit représentait au 31 décembre 2015, 55,5 % de l’actif de la société étrangère, que l’actif de cette société n’était pas principalement constitué de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants et que ses revenus n’entraient, par suite, pas dans les prévisions de l’article 123 bis du CGI.